« Viatique du pèlerin qui part au Magal », Par El Bachir Thiam

“Sou ngén ma déglo téy ma déllou yêté ndax gniy nélaw sén xolyi déllou sêti” Ainsi s’énonçait Cheikh Moussa Kâ dans son célèbre “Diazaou Chakoor” où le soufi s’efforçait de rendre compte de la dimension exceptionnelle de son guide spirituel. “Aiguisez l’entendement, que je puisse vous informer afin que le coeur des ignorants s’asperge de la vérité. Car, un ignorant se doit d’apprendre pour se départir de l’obscurantisme.

Dans ce rocambolesque oeuvre, l’illustre poète de Bamba relatait déjà, pour la postérité, la quintessence du magal: “Dégloul ma waxla la waral magal gui nga xam né Cheikh Bamba reuyeul démam gui. Tarikh ba ama diaychachin moy atma, modi leuleup Serigne Bachirou Mbékmi…” (Je te dirais sur l’origine du magal et tu sauras comment le Cheikh magnifia son exil. Ce fut à l’époque de la naissance de son quatrième fils, Cheikh Mouhammadou Bachir (l’agrément). Parlant de ce jour, le Cheikh a dit que Dieu l’a honoré en ce 18 safar et lui a conféré le sacre qu’il fit de la tabaski à l’honneur d’Abraham et de sa famille!

A bien y regarder l’engouement spectaculaire, en prélude du magal, prouve à bien des égards que l’humanité toute entière, les plus zélés et les plus passionnés des disciples, sont encore loin d’épuiser toute la plénitude de cet évènement. Loin de moi l’idée de m’atteler, ici, à la description d’une effervescence quelque peu mise en trop.

Car, nous sommes d’avis que le refrain des khassaides ayant pignon sur rue, de même que la ruée des disciples mourides de New Jersey à Brazilia, du Cap au Caire, de Madrid à Tokyo n’est que la face visible de l’iceberg. Mais quoi donc? Le vénéré fondateur ne disait-il pas justement dans “Limahin bachirin”: “Le créateur a disposé à ma gouverne la destinée des créatures et il honore volontiers toute requête que je lui adresse”.

Retenons seulement, en passant, que les milliers d’individus, toutes appartenances ethniques et religieuses confondues qui font font cap sur la ville sainte de Touba, relatent, en filigrane, que les plus ignares des hommes sont ceux qui s’arc-boutent encore à encastrer l’oeuvre de Cheikh Ahmadou Bamba dans les carcans d’une simple confrérie, rivalisant d’ardeur avec tant d’autres ! Mais là n’est pas le but de nos propos.

Nous étions convenus, à l’origine de cet écrit, de revenir en avertisseur, comme à l’accoutumée, sur l’histrionisme de certains de nos compatriotes qui miment la sainteté dans les lieux saints et n’hésitent point à les transformer en des officines de perversion. Les récentes descentes de la police dans certains coins à Touba se sont soldées par la saisie d’une importante quantité de stupéfiants bannis. Aujourd’hui, force est de reconnaître que des énergumènes s’activent à ternir l’image divine de Touba par des pratiques odieuses qui n’honorent guère son fondateur.

En vérité, l’on ne peut omettre que, de plus en plus, la débauche est colportée jusque dans les confins de la ville sainte lors du magal. Vol, escroquerie, arnaque et même la prostitution sont au rendez-vous et commis, en catimini par ceux qui n’ont cure de s’enquérir de la dimension spirituelle de l’évènement. Des soi-disant “marid” ou “marir” au coeur atrophié et qui, à vrai dire, ne se différencient des bêtes brutes que par la parole. Ces gens pour qui, la foi est un mode ou plutôt un vil manteau dont on peut se départir au gré du vent, devraient bien se voir interdire tout accès dans la ville sainte.

Ce, selon les prérogatives du Cheikh qui s’érigeaient dans “Matlaboul Fawzeyni” contre toute forme de transgression en ces termes: “Fais de ma demeure la ville sainte de Touba, un lieu de sanctification pour tout musulman, un lieu où l’humiliation et l’ostracisme frappent le transgresseur délinquant et pervers” et il ajoutait “Seigneur, protège cette cité du vagabondage, de la délinquance et de la promiscuité” avant de terminer “Fais de ma demeure, la cité bénite de Touba, un lieu qui accorde le bénéfice charismatique du pèlerinage à l’indigent qui nourrit le voeu pieux de l’accomplir”.

Au demeurant s’il y’a un viatique que le pèlerin mouride devrait s’approprier c’est bien l’éternel exhorte des vénérés khalifes de Serigne Touba et que le dernier fils de Bamba Serigne Saliou avait réitéré au dernier magal de son vécu: “Tout pèlerin qui vient, je l’invite à parfaire sa résolution , épurer son intention et soigner sa conduite car je ne doute pas que toutes les requêtes seront exaucées à condition que les résolutions soient raffinées jusqu’au bout. Ceci est une vérité à laquelle je ne prête guère deux hypothèses”.

C’est donc là l’invite vite faite à ceux qui s’en iront commémorer dans la droiture et qui ne doivent pas perdre de vue que, par delà les clivages du temps, le magal reste fidèle à son essence. Un culte religieux. Et le culte n’admet point le désordre dans ses principes, comme le dicte la sourate 222 au verset 67 du saint coran. Autrement dit , au delà de la réjouissance, le magal est une occasion pour le disciple de renouer avec les recommandations du Cheikh qui tendent toutes à la réalisation de l’homme mouride comme modèle de l’humain par excellence (Al insanoul Kaamil)

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