Le PKK : une lutte armée qui a façonné le Moyen-Orient pendant des décennies

Depuis plus de quarante ans, le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) mène un combat acharné en Turquie, un conflit qui a engendré plus de 40 000 morts. Initialement, le mouvement visait la création d’un État kurde. Toutefois, ses militants ont progressivement réorienté leur stratégie vers la reconnaissance de leur culture et de leur identité, tout en conservant des méthodes souvent radicales. Cette évolution inclut un appel récent à un cessez-le-feu, mettant la région entière au cœur des discussions stratégiques.

Capté par l’objectif en 1992 dans la vallée de la Bekaa au Liban, Abdullah Öcalan est connu comme le chef historique du PKK. Son parcours complexe et souvent controversé mêle ambitions politiques et réalités militaires.

L’histoire du PKK est complexe, marquée par des sentiments contradictoires. Pour certaines familles kurdes, notamment celles de Berlin, le PKK représente un mouvement clandestin qui a séduit un fils ou une fille, transformant les aspirations personnelles en engagements militaires. Beaucoup ne reviennent jamais, perdus dans une lutte que certains parents considèrent comme une quête héroïque, notamment contre des ennemis tels que Daech dans les années 2010. Cette organisation est toutefois désignée par l’UE et les États-Unis comme terroriste.

En fin 1993, l’Allemagne a interdit ce groupe révolutionnaire qui, bien qu’il se présente comme un parti politique socialiste et nationaliste, visait la défense des droits kurdes. Simultanément, la France a dissous des organisations liées, jugées comme des « façades légales ».

Le PKK est loin de représenter l’ensemble des Kurdes, une communauté éparse retrouvée jusqu’en Arménie et Géorgie. Le « Grand Kurdistan », territoire conceptuel à cheval sur la Turquie, l’Irak, la Syrie et l’Iran, comprend bien d’autres groupements culturels et linguistiques. Partisan du marxisme-léninisme dès sa fondation en 1978 par d’anciens étudiants d’Ankara, dont Abdullah Öcalan, le PKK s’est inscrit dans l’héritage de la Guerre froide, semblable en cela aux FARC. La liste de ses martyrs inclut Sakine Cansiz, parmi d’autres, assassinée en 2013 à Paris avec deux autres militantes.

Les puissances européennes ont joué un rôle déterminant dans cette région, redessinée à la suite de la Première Guerre mondiale, notamment via la carte Sykes-Picot de 1916, suivie par des accords à Sèvres en 1920 et à Lausanne en 1923. Ces traités marquèrent la fondation de la République turque et mirent en avant la reconnaissance des minorités grecque, arménienne et juive, mais pas kurde, la situation étant compliquée par la majorité musulmane des Kurdes.

Selon le politologue Nicolas Monceau, interrogé par RFI et dont les propos sont relatés par nos confrères de Sud Quotidien, l’État-nation turc s’est toujours construit sur un modèle centralisé, semblant nier les réalités ethniques. Cette dynamique demeure actuelle, comme l’illustre la rhétorique du président Recep Tayyip Erdogan sur l’expansion potentielle de la politique démocratique.

La formation du PKK dans les années 1970 résulte de multiples influences, comme l’explique l’historien Boris James. Les étudiants kurdes n’étaient qu’une partie du terreau idéologique radical de l’époque, un mélange de républicanisme, marxisme-léninisme et parfois maoïsme. Durant les années 1950, les tensions entre les partis communistes régionaux et la gauche kurde émergente définissent une époque où les revendications autonomistes sont de plus en plus alignées avec la lutte socialiste. Cette dynamique est accaparée par le mouvement d’Öcalan, qui voit dans la question kurde un moyen puissant de porter ses idéaux socialistes.

Le climat politique de la Turquie, exacerbé par des coups d’État en 1960 et 1971 et l’instabilité qui s’ensuit, favorise la montée des affrontements idéologiques et violents entre forces radicales de gauche et d’extrême droite. Les conséquences de cette époque troublée continuent de se faire sentir aujourd’hui, tissant le tissu complexe de l’histoire politique kurde et turque que Sud Quotidien a largement documentée.

Le PKK : une lutte armée qui a façonné le Moyen-Orient pendant des décennies

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