« Taisez-vous, Monsieur ElKabbach! » (Par Adama Gaye)

Cercle

Les vieux de ma génération se souviennent de l’esclandre de Georges Marchais, l’emblématique patron du Parti Communiste Français des années 1970, quand, un soir, à la télé, il s’écria, pour le faire taire, devant l’un des plus grands journalistes de son pays, au milieu d’une grande émission politique, intitulée

Cartes Sur Tables…
C’était sa manière de freiner les questions gênantes, pointues, que lui soumettait son interlocuteur, un Jean-Pierre Elkabbach, teigneux en diable.

Depuis lors, chaque fois qu’un homme politique est poussé à la défensive ou que ses ouailles montent au créneau pour le défendre cette image d’un Marchais voulant imposer sa loi (my way or the highway, disent les Américains) me revient en tête, et tourne en boucle.

Nous avions connu ce moment de pensée unique aussi en Afrique, notamment au Sénégal, avec la réalité du monopartisme de fait ou presque de jure que nous avons traversée jusqu’avant la restauration, en 1974, du pluralisme politique, d’abord contrôlé, limité à 4 courants, puis ouvert à tous les vents et paroles.
La lutte pour la démocratie n’a jamais été un fleuve tranquille. Ce fut pour nous qui y avons joué notre partition un combat ardu, au prix de sacrifices multiples et de vies chahutées parce qu’elle supposait une posture de défiance face au culte longtemps prévalent d’une univocité, ce que Wade a appelé celle des ménages à enfant unique, forçant le peuple entier à suivre le discours dominant, unilatéral, qui fut celui porté par le premier Président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor.

Fast-forward. A l’ère de ce que j’ai défini comme celle de la techtonique des plaques (je n’écris pas tectonique comme les géologues mais bien TECHtonique, pour refléter l’alliage de la technologie et de la tectonique, qui traduit un mouvement lent des plaques géologiques), la pluralité du discours n’est plus seulement un sous-produit de la démocratisation.

La technique et les facilités nouvelles l’imposent. Du plus éloigné recoin, on peut, en effet, participer aux flux des informations contradictoires et, donc, à la formation des opinions, des idées, des inventions, des querelles ou encore des consensus.

Plus significatif encore, nous sommes pareillement sous l’œil, dirait George Orwell, de ces technologies qui ne laissent rien passer de ce que nous disons, écrivons, bref, faisons. Une revue par les pairs, parfois anonymes, s’instaure, qui est impitoyable. La confrontation des idées n’en est que plus féroce, intense, tel un volcan projetant sa lave sur son espace alentour.

Qu’on ne s’y trompe donc pas: le débat contradictoire, par essence consubstantiel à la démocratie, n’est plus une option mais un impératif. Il se trouve hélas dans notre pays des personnes, sans doute mues par leur passion et parti-pris pour s’imaginer qu’on peut imposer sans un arbitrage électoral du peuple souverain, des orientations politiques qui sont les leurs.

C’est ainsi qu’hier j’ai été pris d’un rire amusé en constatant qu’une horde déchaînée a pensé pouvoir me dénier le droit de soulever une faute de grammaire de Monsieur Ousmane Sonko (je suis preneur de toutes corrections sur mes écrits si elles peuvent les améliorer, please). Sont-elles des fanatiques? De Feddayins? Des militants? Des extrémistes? ou de simples êtres qui défendent de bon cœur leurs choix politiques?

N’ayant pas de réponses précises à ces interrogations, je donne ma langue au chat pour me consacrer à ce qui demeure une certitude:; le débat contradictoire n’est pas négociable. Celles et ceux qui pensent que l’exigence est de le faire en langue nationale, Wolof en l’occurrence, sont libres de suivre cette voie. Telle n’est pas la mienne. Autant je suis un militant des langues nationales, autant je suis aussi conscient d’une part qu’en choisir une quelconque c’est risquer de provoquer une levée de boucliers dans ce contexte de montée en puissance du discours ethniciste ambiant mais se priver d’un accès, toujours utile, aux langues internationales de communication voire d’affaires, incluant le français, l’anglais, l’arabe, l’espagnol pour ne citer que celles là…

Beaucoup m’ont écrit en privé, y compris des cadres de PASTEF et l’un d’eux m’a dit ceci: « il faut ignorer certains agités qui ne représentent pas le Mouvement ». J’ai, pour ma part, largement ouvert mon espace aussi bien sur l’internet que sur mon téléphone et reste disponible à tout échange. On ne me reproche plus de bloquer celles et ceux que je considérais comme insolents ou violents dans leurs discours.

Cette posture de dialogue, un autre nom du débat, est la preuve, je pense, de mon ouverture d’esprit. C’est cela que je souhaite voir dans mon écosystème. Le débat, c’est la vie, c’est la démocratie, c’est un droit humain inaliénable. Je regrette donc de le dire une bonne fois pour toutes: quiconque est dans l’arène politique, n’en déplaise aux vuvuzélateurs de tous poils, doit s’attendre à ce que le débat soit vigoureux, n’ignorant aucun aspect de ce qui l’anime.

La pensée unique, que ce soit clair, ne passera pas. L’insolence sera affrontée avec vigueur et sans concessions. On ne se donne aucune limite sur le front des droits constitutionnels que nous avons acquis de haute lutte. Quiconque a pu penser une seule seconde que mon combat acharné, au prix d’un séjour carcéral et de maintes privations, ne vise que la seule personne de Macky Sall se trompe lourdement. Nul n’en est à l’abri. NUL…

Je ne dis pas comme Marchais TAISEZ-VOUS mais ressaisissez-vous, NUL ne peut arrêter ce flot de nouvelles, d’opinions et de saillies contradictoires qui sont devenues les marqueurs les plus déterminants de notre humanité. Quiconque, moi le premier, ayant le PROJET de formater la marche de notre pays et de peser sur la voie qui doit être celle de notre peuple, n’a qu’à se préparer: aucun cadeau, hormis ce que donneront les fanatiques délurés, ne sera donné.

L’affrontement politique, pluriel, aura lieu. Nous ne sommes pas ici pour fabriquer, encore moins participer à la fabrication, de quelque monstre que ce soit. NUL n’imposera une pensée unique ici ni un silence ou un alignement: la démocratie c’est la contradiction, que ce soit dit et entendu.

Aboyer en exhibant mille crocs n’empêchera pas qu’on dise son fait ou ses fautes à Sonko ou n’importe quel autre politicien qui sortirait de la route, et vous ne nous dicterez pas le choix du leadership que nous voulons pour ce pays.

En un mot, la dictateur de la pensée ne peut exister que dans les cervelles des abrutis chasseurs de pouvoir et privilèges qui se cachent derrière un militantisme plus alimentaire que de valeurs.
Arrêtez ce cirque, nul n’est dupe. Vous donnez l’air de minables antidémocrates qui ne veulent pas entendre ni voir la vérité en pensant pouvoir forcer votre voie et vos êtres sur nos destins. Douffi amm. Vous ne pouvez pas nous convaincre sans des arguments et des chiffres, des données (on croit tous à Dieu mais qu’on amène d’abord les chiffres et arguments fiables).

Ce petit terrorisme même pas structuré ne passera pas plus loin que le bruit qu’il dégage de vos bouches et de vos plumes qui font fuir. Vous êtes les pires ennemis, en somme, du rêve Pastéfien.
Parce que le Sénégal ne laissera personne lui dicter son imperium. Yoyou khewi naa.

Enfin, de grâce, qu’on ne me force pas à sortir mon couperet pour évincer de mon espace les impolis ou tenants d’un discours dictatorial au service de leurs croyances politiques, ce lieu n’étant pas de propagande. Le critère pour en faire partie, c’est l’élégance, la classe et l’intelligence, pas la brutalité ni le manque de tenue…

Alléluia.
Bonne semaine.
Ps: tout acte d’impolitesse (rewandeh) sera traité avec une vigueur impitoyable et toute dérive qui déborde des règles sera soumise aux voies idoines. Kuuffiy dofflou dinga tasseh ak sa domou badiane.

Adama Gaye* est un acteur politique Sénégalais.

3 thoughts on “« Taisez-vous, Monsieur ElKabbach! » (Par Adama Gaye)

  1. Moi

    Bien fait pour toi. Quand les pastefiens traité les autres de tous les noms d’oiseaux on ne te pas entendu dire stop à ses derives parceque tu étais dans leurs camps limite tu applaudissais. ce n’est que le début et un avertissement pour les autres qui oseront quitter le navire Sonko seront traités pareille c’est la pensé unique chez eux seul Sonko a le monopole du savoir tout le reste est poubelle et anti patriote.
    A bon entendeur…

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