Un gardien sur le podium du Ballon d’Or, cela reste une anomalie. Voilà pourquoi la présence de Manuel Neuer parmi les trois finalistes de l’édition 2014 est déjà exceptionnelle.
Ils forment une communauté à part. Minuscule, presque marginale. Le palmarès du Ballon d’Or déroule rarement le tapis rouge aux gardiens de but et un rapide coup d’œil dans le rétroviseur permet de mesurer la portée de l’exploit de Manuel Neuer, finaliste de l’édition 2014 en compagnie de Cristiano Ronaldo et Lionel Messi. Le champion du monde allemand n’est que le sixième dernier rempart à figurer sur le podium de la plus prestigieuse des récompenses individuelles. Avant lui, beaucoup de légendes.
Neuer – Eurosport
La première d’entre elles, Lev Yachine. L’araignée noire est le seul gardien de but à avoir remporté le Ballon d’Or. C’était en 1963 après son cinquième sacre national en URSS avec le Dynamo Moscou. En 51 ans, aucun autre portier n’a décroché le Graal. En 1973, Dino Zoff s’est heurté à une autre légende : Johann Cruyff. Champion d’Italie et finaliste de la Coupe des clubs champions avec la Juve, Zoff est très très loin du génial Néerlandais dans le décompte final (47 points contre 96).
La Coupe du monde et l’Euro pour booster leur candidature En 1976, Ivo Viktor inaugure l’une des grandes tendances pour les gardiens dans la course au Ballon d’Or : hormis Oliver Kahn en 2001, ils devront leur présence sur le podium à leurs exploits lors d’une grande compétition internationale : l’Euro ou la Coupe du monde. Et ce n’est pas Manuel Neuer, sans doute le joueur le plus décisif au Brésil cet été, qui dira le contraire. En 1976, quatre jurés placent Viktor en tête de leur scrutin et pour cause, c’est lui qui mène la Tchécoslovaquie sur le toit de l’Europe en 1976. Mais cette année-là, l’immense Franz Beckenbauer, finaliste de l’Euro et vainqueur de la Coupe des clubs champions devant l’ASSE (1-0), écrase les votes (91 points) devant Rob Resenbriink (75 points) et Viktor (52 points). Il faudra attendre 25 ans, soit le début des années 2000, et l’émergence d’Oliver Kahn comme patron du Bayern Munich, pour revoir un gardien de but figurer parmi les trois meilleurs joueurs du monde. En 2001, il stoppe trois penalties en finale pour permettre au Bayern de décrocher sa première C1 depuis 25 ans. Un exploit retentissant mais insuffisant pour barrer la route de Michael Owen (Liverpool). Douze mois plus tard, Kahn fait de nouveau partie des favoris. Elu meilleur joueur de la Coupe du monde 2002, il est devancé par deux champions du monde brésiliens : Ronaldo, auquel il offrira un but en finale du Mondial en relâchant une frappe de Rivaldo, et Roberto Carlos.
Si même Buffon… En 2006, l’Italie est, elle, bien championne du monde et Gianluigi Buffon, exceptionnel lors du tournoi allemand, est un candidat idéal au Ballon d’Or qui aurait pu couronner une carrière parfaite. Mais le portier de la Nazionale est devancé par l’un de ses équipiers, Fabio Cannavaro (124 points contre 173) prolongeant un peu plus encore la malédiction qui frappe les rares gardiens de but dans la course au Ballon d’Or.
Cette année encore, Manuel Neuer, pourtant unanimement reconnu comme le meilleur spécialiste mondial à son poste, aura bien du mal à s’imposer au palmarès. D’autant qu’un autre obstacle, tout aussi imposant, se dresse sur son chemin : le duo Messi-Ronaldo qui a confisqué les six dernières éditions. Neuer devra sans doute se contenter d’une place sur le podium. Mais ne nous y trompons pas, c’est déjà un exploit.